Interdiction de la pêche à l’anguille : s’adapter au contexte local pour préserver l’espèce et les marais

Un arrêté ministériel du 9 mars dernier fait peser de lourdes menaces sur les marais du Payré.

Environnement

Publié le vendredi 5 mai 2023

La pêche à l’anguille : une activité traditionnelle liée à l’identité même des marais du Payré

Les marais du Payré s’étendent sur plus de 850 hectares et sont situés sur les communes de Talmont-Saint-Hilaire, Jard-sur-Mer et Saint-Vincent-sur-Jard en Vendée. Ces marais créés par l’Homme il y a de cela plusieurs siècles, sont étroitement liés à l’anguille dont la pêche est une tradition séculaire de ces marais, elle en est même l’activité structurante.

Cette pêche traditionnelle a participé à forger et enrichir l’identité, l’histoire et la culture de notre terroir avec son vocabulaire, son patrimoine bâti et ses traditions transmises de génération en génération.

L’architecture et le fonctionnement uniques des marais du Payré sont axés sur l’accueil de la faune aquatique, en particulier de l’anguille. Aujourd’hui, les marais du Payré, constituent un environnement unique et diversifié, l’un des plus riches de Vendée, et sont reconnus au travers du réseaux Natura 2000.

La qualité de cet écosystème, qui favorise la croissance de l’anguille avant son retour en mer pour se reproduire, dépend entièrement de l’entretien et de la gestion des marais par les propriétaires. Cette gestion quasi-quotidienne des marais assure un fonctionnement écologique optimal contribuant à préserver l’anguille, ainsi que tout un écosystème essentiel pour de nombreuses espèces patrimoniales.

Pour de nombreux propriétaires, l’intérêt de conserver ces marais est limité à la perspective de pêcher quelques poissons et des anguilles.

 

Un arrêté aux conséquences néfastes pour les marais du Payré

Un arrêté ministériel pris le 9 mars dernier a interdit la pêche de « loisir » de l’anguille jaune atlantique. Or les conséquences de cet arrêté pour le territoire des marais du Payré pourraient être lourdes.

Une interdiction totale de cette pêche pourrait entraîner un désintérêt et un abandon des marais par les propriétaires, ce qui conduirait à l’effet inverse de l’objectif recherché, avec la disparition de ces milieux indispensables pour la préservation de l’anguille.

 

De plus, cette mesure aurait des conséquences néfastes sur l’ensemble de la biodiversité qui peuple ces écosystèmes, mais aussi sur le patrimoine matériel et immatériel de ces marais.

 

De plus, l’interdiction de la pêche à l’anguille de loisir dans les marais du Payré aurait un impact direct sur les dynamiques territoriales et la mise en œuvre ou la poursuite d’actions visant à restaurer et préserver les milieux naturels, les paysages et la richesse culturelle inestimable de ce territoire. Les propriétaires de marais jouent un rôle crucial et moteur en participant activement à de nombreux dispositifs qui sont essentiels pour préserver les multiples enjeux du site, tels que Natura 2000 et l’Opération Grand Site de France du Havre du Payré. Une telle interdiction menacerait la continuité et l’existence même de ces dispositifs.

 

 

Une proposition de modification pour préserver l’espèce, s’adapter au contexte local et mener une étude approfondie

L’arrêté d’interdiction est actuellement en cours de consultation. Aussi, le Département de la Vendée, la Communauté de communes Vendée Grand Littoral, les communes de Talmont-Saint-Hilaire et Jard-sur-Mer ainsi que l’association de défense des marais du Payré se mobilisent ensemble pour demander une modification. 

Conscient de l’état actuel des populations d’anguilles et dans un but commun de préserver cette espèce qui est au cœur de la vie de nos marais, les signataires de la demande souhaitent proposer l’ajout d’un article à l’arrêté actuel. Cet article permettrait aux préfets de région de déroger à la réglementation nationale de la pêche de l’anguille dans des secteurs géographiques spécifiques, en prenant des mesures adaptées et précisément définies par arrêté préfectoral.

Cette proposition permettra de s’adapter à des contextes locaux très spécifiques tel que les marais du Payré.  Bien entendue, la prise de ces arrêtés dérogatoires encadrant localement la pêche de l’anguille doit se faire conformément aux réglementations en vigueur, notamment celle du Conseil Européen du 18 septembre 2007 (EC 1100/2007), dit règlement « anguille ».

Pour cela, les collectivités locales, les acteurs locaux et les propriétaires de marais souhaitent ensemble mener une étude complète en 2024 sur les marais du Payré afin de connaitre l’état de la population d’anguilles, les stocks actuels, les effets de la gestion des marais, le taux de renouvellement des populations et le potentiel de production d’anguille argentée. Cette étude permettrait finalement d’élaborer un plan de gestion de l’anguille sur les marais du Payré conformément à la réglementation européenne et d’obtenir à destination uniquement des propriétaires de marais une autorisation encadrée de la pêche de « loisir » avec des quotas annuels, des préconisations ou obligations de gestion si nécessaire et un suivi continue de la population d’anguilles sur ce secteur à des intervalles réguliers.

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